Tout le monde parle d’outils d’IA générative tels que ChatGPT et DALL-E, mais qu’est-ce que l’IA générative exactement? En quoi diffère-t-elle de l’IA automatisée? Et comment les deux peuvent-ils travailler ensemble pour s’attaquer à des problèmes importants tels que le changement climatique? Nous avons rencontré Jean-Simon Venne, cofondateur et directeur de la technologie de BrainBox AI, pour l’interroger sur l’IA générative et l’IA automatisée, sur la manière dont elles pourraient fonctionner en tandem pour réduire les émissions des bâtiments commerciaux et sur la responsabilité des entreprises technologiques pour aider à réguler cette bête en plein essor.
Tout d’abord, l’IA est un terme très large. À la base, il s’agit d’une machine à laquelle on donne un ensemble de règles ou de paramètres qu’elle suit pour parvenir à une conclusion en quelques secondes seulement. Ainsi, un résultat que nous aurions mis des heures ou des jours à obtenir par nous-mêmes peut désormais être obtenu en une fraction de temps. Ce type d’IA traditionnelle existe depuis longtemps, mais c’est l’apprentissage profond qui a véritablement pris son essor au cours des dix dernières années environ.
L’apprentissage profond reproduit le même type d’architecture que celle de notre cerveau, ce qui permet aux machines de prendre des décisions de la même manière que les humains. Il peut même reconnaître des images et traiter le langage. Il suffit de lui envoyer un tas de données pour qu’il soit capable de les traiter, de les analyser, d’en tirer des enseignements et d’arriver à une conclusion. Et il le fait continuellement, en s’améliorant sans cesse.
Je dirais que les modèles d’apprentissage profond sont assez récents, car ce n’est que depuis une dizaine d’années que nous disposons enfin de la puissance informatique nécessaire pour héberger ce type de technologie. De plus, les mémoires sont désormais plus abordables. Ces deux éléments ont véritablement contribué à ouvrir l’espace nécessaire à la croissance et à l’épanouissement de l’IA. En fait, cet espace s’est ouvert si rapidement que les gens s’inquiètent de notre incapacité à le gérer. Et aujourd’hui, avec l’arrivée de l’IA générative, il se développe encore plus rapidement que quiconque aurait pu l’imaginer.
Ce qui différencie l’IA générative de l’IA automatisée, c’est que l’IA automatisée est contrôlée, alors que l’IA générative est créative.
Ce que je veux dire par là, c’est que l’IA automatisée ne fonctionne que dans le cadre étroit des directives que nous lui donnons, ce qui la rend très douée pour optimiser quelque chose qui existe déjà. Par exemple, BrainBox AI utilise l’IA automatisée pour optimiser les systèmes de CVC. Nos modèles sont formés pour être des experts en matière de thermopompes, de ventilateurs, de clapets, etc. Ils n’ont aucune idée de ce qu’est un Land Rover. Et ils n’ont pas besoin de le savoir, car leur travail est très spécialisé et n’a rien à voir avec les Land Rover.
L’IA générative, quant à elle, est conçue pour créer quelque chose d’entièrement nouveau à partir de quantités massives de données et de paramètres. Elle est conçue pour répondre à toutes les questions que vous vous posez. Elle doit connaître l’histoire, la biologie, la chimie, les œuvres complètes de Shakespeare – elle doit tout savoir sur tout parce qu’elle ne sait jamais ce que vous allez lui demander.
Donc, même s’il s’agit de deux systèmes très différents, ils utilisent tous deux l’apprentissage profond pour trouver la solution optimale à un problème ou à une question. En fait, les modèles d’IA générative dont nous disposons actuellement, comme ChatGPT4, sont les plus grands modèles d’apprentissage profond que nous ayons aujourd’hui. Pour mettre les choses en perspective, le premier GPT lancé par OpenAI en 2018 utilisait 117 millions de paramètres, la deuxième version a été publiée l’année suivante avec 1,5 milliard de paramètres, et la troisième avait 175 milliards de paramètres. Personne ou presque ne pensait que nous pourrions atteindre un billion. Cela signifie que ces systèmes peuvent traiter plus de données que nous ne l’avions jamais imaginé et qu’ils peuvent en tirer des enseignements incroyablement complexes.
Je mentirais si je disais que je ne l’ai pas utilisé pour créer mes diapositives PowerPoint. Mais plus sérieusement, nous sommes en train d’évaluer l’utilisation de l’IA générative pour générer des tests et des cas d’utilisation du côté du développement de logiciels, ce qui rend le code plus efficace et efficient. Ces cas prennent beaucoup de temps et les développeurs de logiciels n’aiment pas souvent les préparer, mais avec ces nouveaux modèles d’IA générative, il suffit d’appuyer sur un bouton pour que vos cas d’utilisation soient générés en quelques secondes. Cela représente environ la moitié du temps d’un développeur et, pour une entreprise, cela revient à doubler sa productivité.
En ce sens, oui, je crois que toute entreprise qui n’adoptera pas ces outils sera rapidement dépassée.
C’est certain. Je pense qu’à l’avenir, l’IA générative pourrait avoir un rôle important à jouer, par exemple, dans la planification et la conception de nouveaux bâtiments, en particulier de bâtiments plus durables. Par exemple, si vous souhaitez construire un bâtiment qui optimise la consommation d’énergie, l’IA générative pourrait vous aider à concevoir le bâtiment, les différents étages et les espaces de travail ou de vie d’une manière respectueuse de la planète.
Elle pourrait également aider les ingénieurs à créer des systèmes d’exploitation des bâtiments plus durables. Peut-être pourraient-ils l’utiliser pour concevoir une nouvelle thermopompe qui consomme moins d’énergie ou un nouveau système de ventilation qui optimise la qualité de l’air.
La réponse courte : oui. En fait, il existe une jonction intéressante entre l’IA générative et l’IA automatisée dans le domaine de l’immobilier où l’IA générative pourrait être utilisée pour évaluer un nouveau bâtiment et identifier les possibilités de mise en œuvre d’un logiciel d’IA automatisé capable d’optimiser l’efficacité énergétique et de réduire les émissions. Ainsi, une fois que l’IA générative a été utilisée pour étudier un bâtiment et suggérer diverses applications d’IA contrôlée, l’IA automatisée peut prendre le relais et s’assurer que le bâtiment fonctionne de manière optimale. Si nous appliquons ce type de cas d’utilisation symbiotique à une échelle suffisamment grande, il existe un réel potentiel de portée positive sur le changement climatique.
Honnêtement, je ne pense pas que tout cela soit hors de portée, étant donné la rapidité avec laquelle l’IA évolue. En fait, l’autre jour, je repensais au fait qu’au début de BrainBox AI, j’avais dit à mon équipe de dix personnes : « N’attendons pas que les instances dirigeantes se mettent d’accord sur la manière dont nous allons sauver la planète du changement climatique. Aidons-les. Commençons dès maintenant. Développons la technologie de l’IA de manière à ce qu’elle puisse sauver la planète ». Aujourd’hui, je regarde le chemin parcouru par l’IA et je me dis : « Wow, ça y est. Nous avons atteint le point pivot. L’IA va sauver la planète. Alors, assurons-nous de bien faire les choses ».
Je crois que ce que nous considérons comme des coûts peut également être considéré comme des avantages. Le premier coût est que certaines tâches qui étaient auparavant effectuées par des humains le sont désormais par l’IA. Mais cela permet aussi d’économiser beaucoup de temps et d’argent.
Un autre coût/bénéfice est que l’IA évolue beaucoup plus rapidement que nous le pensions. Si vous m’aviez dit il y a deux ans que l’IA en serait là aujourd’hui, j’aurais répondu « Impossible. Peut-être dans la vie de mon fils et de ma fille, mais certainement pas dans la mienne. » Mais nous y sommes. Ça se passe aujourd’hui. Le génie est sorti de la bouteille et nous ne pouvons pas le remettre dedans. Il faut donc maintenant trouver comment s’y adapter. Nous devons également commencer à répondre à des questions très importantes, telles que : comment élaborer des lignes directrices sur la manière d’utiliser cette technologie?
Telles sont les grandes questions. Peut-on réglementer l’IA générative? Si oui, comment? Cela sera-t-il volontaire? Pouvons-nous faire confiance aux entreprises lorsqu’elles affirment qu’elles réglementent leur utilisation de l’IA générative?
Je pense que l’un des principaux problèmes est que le développement de ce type de technologie est trop rapide pour que l’on puisse même tenir ces débats. Les instances dirigeantes n’ont pas les moyens de suivre le rythme. Et cela va trop vite pour que l’industrie technologique puisse décider de la manière de l’aborder.
C’est pourquoi nous avons besoin que les entreprises ayant une expérience de l’IA interviennent et contribuent au débat. Ces entreprises doivent prendre l’initiative de recommander les barrières législatives et éthiques à appliquer. Si ce n’est pas le cas, il sera extrêmement difficile pour le gouvernement de rattraper son retard et de mettre en œuvre des réglementations.
Je pense donc que des entreprises comme la nôtre sont parfaitement placées pour donner des conseils sur la manière de réglementer l’IA. Cela fait maintenant six ans que nous sommes dans le domaine de l’IA. Nous savons quels types de questions et de problèmes se posent lors de la mise en œuvre de l’IA et nous avons invariablement dû nous pencher sur l’aspect éthique de la question – les droits des clients, la confidentialité, la sécurité des données, etc. C’est pourquoi je pense vraiment que les entreprises qui ont déjà une connaissance approfondie de l’IA devraient se réunir, s’entendre sur des lignes directrices, sensibiliser les autres et contribuer à ouvrir la voie à une utilisation sûre et efficace de l’IA qui respecte nos droits de la personne et nos valeurs.
Vous savez, c’est drôle. Par le passé, je me suis toujours plaint que l’IA ne se développait pas assez vite. Eh bien, c’est désormais chose faite. Elle est là. Elle évolue. Elle s’accélère. Et elle ne s’arrête pas. Nous ne pouvons pas nous contenter de faire une pause pour reprendre notre souffle et nous y habituer. Nous devons nous adapter à la vitesse à laquelle elle évolue. Et nous devons le faire de manière responsable.
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